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Olivia Gay

Envisagées

EXPOSITION DU 24 MARS AU 26 MAI 2018

« À distance d’un photojournalisme qui privilégie l’instant décisif et les images choc, Olivia Gay poursuit la longue et patiente quête d’un regard. Regard sur le travail sous toutes ses formes – qu’il soit aliéné ou rédimé – et sur les femmes, dont elle narre la rencontre à chaque fois singulière, et dont elle dresse le portrait subjectivé sous la forme de cet “envisagement” cher au philosophe Emmanuel Levinas. Qu’elles soient prostituées, dentellières, caissières, ouvrières, modèles, citadines, moniales, détenues, réfugiées, chacune fait ainsi partie d’une communauté de femmes qui “résistent”, en dépit de tout. 

Résistantes : ainsi vont les femmes d’Olivia Gay. Pour autant, pas de féminisme à la Simone de Beauvoir : l’artiste met plutôt en avant les notions de “discrétion”, d’“accueil” et de “recueillement”, menant ainsi une recherche d’individuation. Le modèle pictural irrigue ces portraits subtils et “grâciés”, qui témoignent d’une immersion à chaque fois renouvelée dans des mondes spécifiques, et de ce qu’on pourrait nommer une spiritualité du visage. »

DOMINIQUE BAQUÉ, HISTORIENNE ET CRITIQUE D'ART

Grace, détenue de la Maison d’arrêt de Caen, série « La vie est belle », 2016

La racommodeuse, série « Dentellières de Calais », 2010

Yuleisy dans son fauteuil rouge, série « Jineteras », Cuba, 2007

« La photographe prend le temps – sept ans pour chaque cycle –, apprivoise, écoute autant qu’elle regarde. Crée du lien, à chaque fois, même si les embûches ne manquent pas. Il y a une véritable obstination dans son travail, une attention sans cesse soutenue à l’autre, une modestie, aussi, à l’écart des tableaux photographiques, non dénués d’emphase, d’une certaine photographie plasticienne.

Là où un Thomas Ruff réifie les visages, Olivia Gay s’en approche au plus près, leur restitue une identité occultée. Voir prend du temps, car il s’agit de voir juste, et de pénétrer des mondes. Celui des ouvrières, des travailleuses, ces oubliées de l’art contemporain, ces exclues du récit national d’aujourd’hui. Enfin leur donner sens et existence : caissières de supermarché, ouvrières soumises aux cadences infernales de la chaîne et aux lois, plus inflexibles encore, du néo- libéralisme avancé, empaqueteuses qui ne verront ni n’achèteront jamais le luxueux produit de leur labeur, domestiques brésiliennes venues de leurs favelas pour entretenir les demeures des plus riches, dentellières de Calais qui tentent de rédimer leurs gestes par l’excellence d’un savoir-faire ancestral... À toutes, Olivia Gay l’affirme : envers et contre tout, vous existez.

Domestica, série « Contemplacoes », Brésil, 2013

Pour autant, pas de politisation de l’image, pas de militantisme édifiant ni de féminisme brandi : Olivia Gay élabore plutôt ce que Levinas appelait bellement un “envisagement” - rien à voir avec le dévisagement, qui est négation de l’altérité. Ces femmes anonymes, enfin, se découvrent un visage. C’est-à-dire une subjectivité que le corps social leur refuse, et qui naît à travers ces images respectueuses.


Les femmes d’Olivia Gay ne sont pas encore des révoltées, moins encore des militantes : mais elles persistent à exister, elles défient la cécité d’une société fracturée dans l’écart devenu incommensurable entre ceux que le hasard a dotés de tous les biens et qui, sans cesse, se montrent, s’exposent, s’affichent, et ceux qui n’ont rien, et dont l’on voudrait nous faire croire qu’ils ne sont rien.

Toutes ces femmes, chacune à leur façon, résistent. Plus que des résilientes, ce sont bel et bien des résistantes, auxquelles le regard d’Olivia Gay donne droit de cité. »

 

DOMINIQUE BAQUÉ

Femme couchée sur fond bleu nuit, série « Kolondimba », Mali, 2009

Lili en costume d’opéra, détenue de la Maison d’arrêt de Caen, série « La vie est belle », 2016

Reportage France 3 Pau Sud Aquitaine

L'artiste

Olivia Gay vit et travaille en Normandie et à Paris.

 

Elle a d'abord étudié l'histoire de l'art à l'Université de Bordeaux, puis la photographie à la New England School of Photography de Boston (USA) et à l'École Nationale Supérieure de la Photographie d'Arles.

Depuis 2001, elle expose dans le monde entier au sein d'expositions individuelles et collectives, comme au Musée National d'Anthropologie à Madrid, au Centro Cultural Correios à Rio de Janeiro, à la Pinacoteca Nazionale à Bologne, ou à la Galerie du Château d'Eau à Toulouse.

Elle a également reçu de nombreux prix et bourses, comme le Prix Kodak avec la mention spéciale du Jury, le Prix Web, France-Brésil, et une aide à la photographie documentaire du Centre National des Arts Plastiques.

En plus de ses activités de photographe, elle enseigne la photographie à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.

 

L'exposition Envisagée est également présentée à la Maison Européenne de la Photographie à Paris en 2018.
 

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